8 June, 2020

Comment l'Afrique de l'Ouest peut étendre son approvisionnement en électricité et atteindre ses objectifs climatiques

Il n'y a pas si longtemps, alors que le développement des énergies solaire et éolienne était encore fortement débattu, les critiques soulignaient les limites de ces sources d'énergie : le soleil ne brille pas toujours, le vent ne souffle pas toujours. Aujourd'hui cependant, les réseaux électriques de nombreux pays sont fortement alimentés par des énergies renouvelables.

Il n’y a pas si longtemps, alors que le développement des énergies solaire et éolienne était encore fortement débattu, les critiques soulignaient les limites de ces sources d’énergie : le soleil ne brille pas toujours, le vent ne souffle pas toujours. Aujourd’hui cependant, les réseaux électriques de nombreux pays sont fortement alimentés par des énergies renouvelables.

Une version en anglais de cet article est aussi disponible.

Le défi de créer des systèmes d’approvisionnement basés sur des énergies renouvelables flexibles, fiables et abordables, réside dans la diversité des situations observées selon les pays et les régions. La planification et le développement de l’énergie renouvelable doivent tenir compte des ressources locales des pays et de leurs infrastructures existantes et prévues. Cela représente un avantage pour les pays qui voudraient conjointement développer leurs réseaux et augmenter leur part d’énergies renouvelables, comme de nombreux pays d’Afrique subsaharienne.

Une technologie ayant la souplesse nécessaire pour compléter la production d’énergie solaire et éolienne est l’hydroélectricité. Elle peut être utilisée comme source constante d’électricité, mais peut aussi compenser les fluctuations des autres sources. Elle doit cependant être correctement planifiée et gérée pour être durable.

Les infrastructures de production d’électricité ayant une durée de vie de 30 à 50 ans, les décisions prises aujourd’hui seront largement déterminantes pour l’atteinte des objectifs climatiques au niveau gouvernemental.

Dans toute l’Afrique de l’Ouest, de nombreux pays sont confrontés au défi de l’augmentation de la demande d’électricité. En parallèle, les effets du changement climatique, principalement causés par l’utilisation de combustibles fossiles, ont un impact important sur les conditions météorologiques de la région et potentiellement sur les rendements agricoles.

L’augmentation de la production d’électricité peut-elle être harmonisée avec les objectifs fixés pour lutter contre le changement climatique ?

Nos recherches montrent que combiner des centrales hydroélectriques gérées de manière durable avec de nouveaux projets d’énergie solaire et éolienne est une option prometteuse pour l’Afrique de l’Ouest. Cela pourrait réduire au minimum l’utilisation de combustibles fossiles, et donc leurs effets négatifs sur le changement climatique, alors que parallèlement la région cherche à élargir l’accès à une électricité plus abordable.

Pool énergétique d’Afrique de l’Ouest

Les pays d’Afrique de l’Ouest ont des potentiels d’énergie renouvelable différents. Le potentiel solaire existe presque partout, tandis que le potentiel éolien est plus élevé le long des zones côtières et dans la partie nord, plus sèche, de la région. Le potentiel hydroélectrique est quant à lui surtout concentré dans la partie sud de la région, qui reçoit le plus de précipitations.

De nombreux pays utilisent déjà de grandes centrales hydroélectriques, comme le barrage Akosombo au Ghana, et de nombreux nouveaux barrages sont en projet. L’énergie solaire et éolienne sont des ajouts plus récents.

Le commerce d’électricité transfrontalier pourrait faire meilleur usage de cette énergie hydraulique, couplée à l’énergie solaire et éolienne. Selon nos recherches, un pool énergétique commun, permettant aux pays de partager leurs ressources, pourrait augmenter de 60 % l’approvisionnement en énergie fiable et renouvelable.

Le diagramme ci-dessous, basé sur notre article, illustre un exemple de contributions potentielles des pays à un tel pool énergétique.

Chaque pays d’Afrique de l’Ouest pourrait contribuer à un pool énergétique ouest-africain commun pour l’approvisionnement en électricité, sur la base de ses propres ressources nationales disponibles. Photo fournie par les auteurs.

Chaque pays d’Afrique de l’Ouest pourrait contribuer à un Pool Énergétique d’Afrique de l’Ouest commun pour l’approvisionnement en électricité, sur la base de ses propres ressources nationales disponibles. Image fournie par les auteurs.

Les pays d’Afrique de l’Ouest collaborent déjà pour des échanges d’électricité, mais principalement dans le cadre de contrats bilatéraux. Le Pool Énergétique d’Afrique de l’Ouest, une agence régionale, prévoit d’intégrer les systèmes électriques nationaux dans un marché unifié à plus grande échelle. Nos recherches montrent comment ces efforts pourraient être rationalisés avec le développement de sources d’électricité renouvelables.

Des efforts similaires sont en cours dans d’autres régions du monde, comme l’Union européenne, où la coopération transfrontalière devrait également se développer pour accroître la production d’électricité renouvelable.

Avantages pour la santé, les coûts et l’écologie

Dans notre article, nous utilisons un nouveau modèle pour examiner les synergies de la production durable d’hydroélectricité avec l’énergie solaire et éolienne en Afrique de l’Ouest. Le modèle montre comment gérer ces sources en combinaison.

Nous montrons que la région peut utiliser l’hydroélectricité, plutôt que les centrales au gaz naturel, pour assurer la fiabilité du réseau tout en augmentant la part d’énergie solaire et éolienne. Le gaz naturel est souvent présenté comme un combustible de transition vers l’énergie durable. Mais les émissions mondiales doivent être proches de zéro d’ici 2050, selon l’accord de Paris. La construction d’infrastructures gazières supplémentaires risque donc d’empêcher l’atteinte de ces objectifs climatiques.

Les effets négatifs de la pollution de l’air sur la santé résultant de la combustion des énergies fossiles sont également bien connus. Il est possible d’éviter ces effets en investissant dans les énergies renouvelables.

Nous soutenons que le coût de l’électricité renouvelable pendant la durée de vie d’une centrale devrait bientôt devenir nettement moins élevé que celui des combustibles fossiles. Ceci est principalement dû à la diminution des coûts de l’énergie solaire photovoltaïque.

La voie à suivre

Notre étude montre qu’une façon d’amorcer la transition vers les énergies renouvelables en Afrique de l’Ouest consiste à optimiser l’utilisation de ressources locales en énergie solaire, éolienne et hydraulique tout en gardant à l’esprit les critères de durabilité. Par exemple, notre méthodologie garantit que le niveau des lacs hydroélectriques et le débit des rivières en aval restent acceptables. Elle souligne également la possibilité de remplacer les futures centrales hydroélectriques par des centrales solaires et éoliennes.

Cela permettra d’accroître la durabilité écologique globale de la production d’énergie renouvelable.

Conjointement, ces mesures contribueront à ouvrir la voie à une transition à long terme vers des systèmes d’énergie solaire photovoltaïque, soutenus par l’énergie éolienne, l’hydroélectricité et le stockage sur batterie.

Notre cadre d’étude n’est pas limité à l’Afrique de l’Ouest. Il peut être utilisé pour d’autres régions qui dépendent fortement de l’hydroélectricité et qui cherchent également à augmenter leur production d’énergie solaire et éolienne.

Les pays d’Afrique de l’Ouest ne sont pas encore liés à de grandes infrastructures de réseau électrique intégré, conçues pour des centrales alimentées par des combustibles fossiles, comme c’est le cas en Europe et en Amérique du Nord. La région peut dès lors planifier ses futurs réseaux en fonction des énergies renouvelables. C’est l’occasion d’aller au-delà des anciennes technologies, ce que d’autres régions du monde n’ont encore jamais fait.

Sebastian Sterl est chercheur en Services climatiques pour l’énergie renouvelable, Vrije Universiteit Brussel et Robert Brecha est professeur à l’Université de Dayton.

Cet article est une traduction d’un article qui est paru dans The Conversation sous une licence Creative Commons. Lire l’article original (en anglais).

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